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5.2.17

♫ Nous sommes les Nains sous la montagne... ♪


Les Nains.

Auteur : Markus Heitz.
Origine : Allemagne.
Nombre de livres : 2 en français, un dans la langue originale.
Date de publication : 2003 en Allemagne, 2008 en France (putain, 5 ans pour traverser le Rhin !!).
Genre : fantasy.

Le Pays-Sûr, terre paisible partagée entre les royaumes humains et les domaines des magiciens, et cerné par une chaîne de montagnes occupée par les Cinq Tribus des Nains.
Voilà plusieurs centaines d'années que les Troisièmes sont devenus des parias, ennemis de leurs anciens frères, et que les Cinquièmes ont été exterminés par une armée d'orques, d'ogres et d'Albes, des êtres apparemment elfiques et malfaisants. Ces derniers se lancent alors à la conquête de tout le Pays-Sûr.

Gundrabur, Haut-Roi des Nains de la tribu des Seconds, doit bientôt nommer son successeur et le principal candidat est le roi Gandogar des Quatrièmes, un Nain belliqueux qui ne cache pas ses intentions d'exterminer les Elfes, déjà mis à mal par leurs cousins maléfiques. Le Haut-Roi décide alors d'imposer la candidature de Tungdil, un nain vivant chez un Magicien, et n'ayant jamais connu son propre peuple.


Sachant que les Nains, ceux de la fantasy, sont à l'origine une trouvaille des mythologies germanique et nordique, il n'est guère surprenant de les trouver dans une série qui, sur sa terre natale, semble avoir une aura bien plus importante que l'univers très anglo-saxon de Tolkien. Non parce que bon, le Rohan c'est l'Irlande, la Comté c'est la campagne anglaise, et le philologue anglais aurait sûrement adoré couler des jours paisibles une pipe à la main et ses grands pieds poilus devant le feu du Dragon Vert à Hobbitbourg.
Les Nains, Die Zwerge dans la langue de Goebbels, est en effet le premier volume de toute une saga dont les Germains sont très fiers, et à raison.

C'est officiel, je veux ces livres en édition originale O_O Ça me fera travailler mon allemand *o*

Publiée au début des années 2000, cette histoire s'éloigne des cadres stricts et, avouons-le, un peu désuets de la fantasy florissante des années 80-90, époque où sont nés plein de clichés qui ont donné au genre son style avant de l'y enfermer (comme dans la Belgariade, qui reste géniale par ailleurs).
Les Elfes et les Nains sont des ennemis traditionnels, mais le récit place les Nains dans le rôle de gardiens du Pays-Sûr, sans lesquels il n'est qu'une prison cernée par les montagnes où les prédateurs peuvent massacrer à loisir. Le fait même que le Pays Sûr soit divisé entre humains profanes, sorciers, Elfes, Nains et que certains territoires soient superposés est très intéressant dans la conception de l'univers.
La division du Petit Peuple en cinq tribus paraît artificielle, chacune ayant sa spécialité à la manière du déterminisme pourri des Maisons de Poudlard dans Harry Potter – il y a les lapidaires, tailleurs de diamants, il y a les tailleurs de pierre, les forgerons... - mais les personnages principaux nous montrent heureusement, comme chez Rowling, qu'ils peuvent dépasser ces carcans pour exprimer leur individualité.

Les personnages, du coup, sont assez attachants ; le récit comme leur écriture les rendent complémentaires, il est possible d'en adorer certains et d'en haïr d'autres (au hasard, Goïmgar Barbe-Brillante, le ptit con lâche et haineux qui annonce d'emblée qu'il ne participe à la quête que contraint et forcé), ainsi que de comprendre leurs motivations, leurs aspirations et leurs préjugés.
Parce que oui, les Nains ont été chargés par leur créateur/dieu de garder le Pays Sûr, mais ça n'empêche pas les humains qui vivent au milieu d'ignorer les courts-sur-pattes et de les traiter avec un peu de dédain, en les appelant Troglodytes, quand ils en croisent, les Nains leur rendant généralement la pareille.

Après, il est difficile d'échapper à quelques poncifs – la prophétie, les personnages qui sont conformistes ou prévisibles, quelques facilités d'écriture ou incohérences – le livre trouve souvent d'excellentes astuces, sans toutefois pondre des deus ex machina ni faire de ses héros des Gary Stu/Mary Sue [spoiler] par exemple alors qu'il est dit que seul un ennemi des Nains peut manier avec succès la Lame de Feu, la hache légendaire forgée pour détruire le Mal, Tungdil apprend qu'il a été élevé par les humains parce qu'il est un enfant abandonné de la tribu des Troisièmes, les Nains renégats qui ont juré la perte de tous leurs anciens frères [fin de spoiler].
Cela dit, le roman reste passionnant parce qu'il ne se concentre pas uniquement sur les Nains, et met en avant quelques humains qui sont, de leur côté, eux aussi en guerre contre l'ennemi du Pays Sûr, et qui bénéficient d'une écriture toute aussi développée que les nabots.

Couverture originale des éditions françaises (parce que les éditeurs français tronçonnent TOUJOURS) de la collection Milady chez Bragelonne. Honnêtement, je suis pas fan, elles n'expriment rien de particulier.

Du coup, je sais pas si c'est un travail de traduction ou si ça vient du texte original mais Les Nains est très facile à lire, le texte étant très fluide et les dialogues naturels et spontanés, loin du conformiste un peu coincé qu'on peut trouver par ailleurs. On sent qu'on est en présence de personnages qui ne parlent pas avec emphase et n'aiment pas ça, ils sont sincères et directs, ça fait plaisir.
L'intrigue est parfois très sombre, comme il se doit dans le genre, il y a des drames, des morts, des tragédies, et parfois des moments de légèreté et d'humour, ce qui fait que les émotions et les sentiments des personnages sont bien traduits par le texte et les formulations.

Un problème qui pourrait se poser est celui de l'identification des personnages, parce que culture oblige, les Nains ont des noms à consonance similaire – Tungdil, Gandogar, Boïndil et Boëndal (un roman de fantasy sans une fratrie de jumeaux ou jumelles, « cela ne se peut » comme dirait Aragorn ^^), Gundrabur, Balendilin, Bislipur, Goïmgar, Bavragor et Balindys (qui est une Naine) – tandis que chez les humains c'est un peu plus variés. Y'a aussi quelques elfes qui sont nommés, notamment chez les Albes, les méchants, mais de manière générale, les personnages principaux et secondaires ont des surnoms qui les qualifient, en rapport avec leur caractère, leur passé ou leur physique, ce qui permet de les identifier à leur apparition.
Enfin, le dénouement est assez ouvert, ce qui est logique et heureux, ouvrant logiquement la voie au reste de la saga.

 Ah bah c'est sûr, en Germanie ça a plus de gueule ! \o/

En bref : premier volume d'une série incontournable en Allemagne, Les Nains mérite vraiment l'attention des amateurs de fantasy, de grandes histoires et d'aventure. Sans avoir l'érudition exacerbée et difficile à manier du Seigneur des Anneaux, ce récit beaucoup plus accessible prend tout de même le temps de développer et de caractériser son univers. L'intrigue, les personnages et l'écriture sont très bons malgré quelques facilités et imperfections : on a là une belle histoire sur la tolérance et le libre-arbitre. Vraiment, je recommande.

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